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Pascal Doucet Bon

Pascal Doucet Bon est rédacteur en chef des éditions spéciales chez France TV, il nous parle ici de son expérience dans l'enseignement du journalisme

Il paraît que l’enseignement est une vocation. Je dirais plutôt que c’est une envie. Shaw prétendait que « Celui qui peut agit, celui qui ne peut pas enseigne ». J’ai souvent servi cette demi vérité aux professeurs que je ne pouvais pas supporter, qui, du coup, me le rendaient bien. George Bernard délivrait cette gentillesse aux enseignants à vie les plus enfermés dans un monde qui protège, c’est vrai, de la compétition professionnelle acharnée.

Mais en ce qui concerne l’enseignement professionnel, je prétends qu’au contraire celui qui enseigne agit mieux. Comme beaucoup de journalistes, ma première expérience s’est déroulée dans mon ancienne école, le CELSA. J’étais aussi flippé que pour mon premier duplex ! Moi, Pascal Doucet-Bon, petit reporter à France 2, qui suis-je pour mettre sur les rails des jeunes gens pour la plupart plus diplômés que moi ?

Evidemment, je me suis vite rendu compte que la pratique professionnelle suffisait largement à ma légitimité. Tous les rédacteurs en chef savent qu’il est plus facile de détecter l’erreur chez un autre que de ne pas la commettre soi-même. Mais encore faut-il parvenir à se faire comprendre. En bon bourrin, mon premier réflexe a été de pratiquer le « vous ne savez pas et moi je sais parce que je l’ai vécu donc bouclez la et faîtes ce que je dis ». J’ai fait ça quelques temps avant de me rendre compte, dans toutes les écoles où j’ai enseigné, qu’une autre voie était possible, et souhaitable.

La méthode péremptoire a néanmoins le mérite de la clarté. La plupart des étudiants va appliquer des règles mécaniquement pour rejoindre la longue cohorte des « journalistes de fabrication » selon les mots cruels de mon ami Michaël Darmon. Mais bien sûr elle ne prépare pas le jeune journaliste à la souplesse nécessaire à un monde des médias de plus en plus protéiforme, dans lequel tous les supports cherchent de plus en plus à affirmer leur identité, adoptant pour cela des pratiques professionnelles distinctes.

Alors comment faire ? Moi, je me suis bricolé au fil du temps une méthode à trois temps, comme la valse que je ne sais pas danser. D’abord, un accompagnement pratique très basique, sans trop d’explication : « là, tu devrais plutôt écrire ceci, tu devrais plutôt aborder ton interview comme cela ». Cela se passe au moment du synopsis des reportages quand les étudiants en font, ou sur le banc de montage.

Puis vient le temps des corrections collectives, quand chacun regarde le travail de l’autre. Amener les étudiants à exercer une critique constructive est un bon test de validation de la première phase, pour enchaîner sur la troisième : raconter à chaque fois que c’est possible la fois où j’ai commis la même erreur, la fois où je suis parvenu à éviter tel ou tel écueil. Raccrocher les erreurs et les réussites pratiques des étudiants à une image plus large, celle de l’histoire des médias et, à chaque fois que c’est possible, aux théories de la communication, ou ce qu’il m’en reste.

Un jour, un étudiant de l’IPJ-Dauphine est venu parler de Marshall McLuhan, que je venais de citer lors d’une longue séance de corrections. J’ai prétexté l’épuisement pour ne pas trop prolonger la conversation. En fait je m’étais vite aperçu qu’il en savait bien plus que moi sur les théories de ce bon vieux Marshall.

Evidemment, ma méthode empirique a un côté « les histoires de l’oncle Pascal Doucet-Bon ». Mais avis aux étudiants qui liraient ces lignes : le premier qui m’appelle Papi passe par la fenêtre… Je me rends compte en écrivant que j’ai intitulé ce texte « Apprendre apprend », et que je n’ai pas développé cette idée. Là, tout de suite, le temps me manque. A suivre, donc.